Le solutionniste peut être dans l’état d’esprit suivant : l’arbre de jeu est déployé devant moi. Les suites qui sont les solutions du problème sont donc écrites, mais noyées dans un océan de suites qui n’en sont pas. Il suffirait d’éliminer les suites ne convenant pas pour trouver la solution sous la forme d’un autre arbre : l’arbre de la solution.
Élaguer l’arbre de jeu est une méthode de recherche par élimination. Elle est peu ambitieuse, mais elle a l’intérêt de pouvoir être décrite. On peut ainsi « fournir des recettes » à l’apprenti solutionniste. Au contraire, pour arriver à la découverte brutale, à l’« illumination », il n’y a pas de recette infaillible, c’est la phase d’analyse et de tâtonnement associée à l’expérience qui semble être la meilleure préparation.
En pratique, on peut souvent s’approcher de la solution en éliminant des pans entiers de suites possibles. Plus l’élagage est fait près de la racine, plus grande est son efficacité. On élimine d’abord les suites qui sont manifestement très mauvaises comme un joueur élimine de très nombreux coups. On élimine ensuite, après étude, des suites qui à priori ne paraissaient pas mauvaises ou paraissaient même plausibles et « naturelles ». Toute élimination comporte un risque, celui d’éliminer la suite-solution. Le risque n’est pas négligeable si le compositeur a pu construire un problème à solution « paradoxale ».
La recherche par tâtonnement et élimination peut être faite dans l’attente du moment de la découverte (eurêka), de l’inspiration. La première partie prépare la seconde. Le lien entre les deux est difficile à décrire.
Nous recherchons la clé d’un problème direct en deux coups en essayant tous les coups blancs.
Nous jouons un coup blanc quelconque. Il nous suffit de trouver une seule réponse noire qui ne puisse pas être suivie d’un coup de mat pour nous convaincre que le premier coup blanc n’est pas la clé. Nous n’explorons donc pas entièrement l’arbre de jeu.
On peut éliminer ainsi de très nombreux coups sans grand effort.
Si on recherche la solution de l’auteur en sachant qu’elle a une forme « parfaite », quelque peu artificielle, on peut se permettre d’éliminer, sans les analyser, les suites dualistiques qui ne peuvent pas avoir été choisies comme solutions par l’auteur.
Par cette méthode, on ne trouvera pas toutes les démolitions éventuelles.
Diagramme A : L’énoncé du problème est sh ‡ 5. La solution est triviale : 1. Rb5 2. Rc6 3. Rd7 4. Re8 5. Rf8 et Th1 ‡. Même si nous ne voyons pas la solution, nous savons qu’elle ne commencera pas par 1. Rb3 2. Rb4 par exemple, car alors 1. Ra3 2. Rb4 serait alors un dual que l’auteur aurait forcément vu...